Prises de positions, expériences, émotions, réflexions, apports subjectifs de corps et d’âme pour mieux comprendre ce que nous fait la crise sanitaire : ces contributions prolongent ou incarnent de façon polyphonique la partie « manifeste ».
Curieux tout de même, cette invocation d’un « monde d’après » apparue alors que nous étions assigné·es à résidence. Les avions avaient cessé de zébrer l’azur, le chant des oiseaux nous berçait, la pollution refluait… Le productivisme en pause forcée, nous allions expérimenter un mode de vie en post-croissance.
Face à l’inconnu, le management médiocratique révélait sa parfaite inutilité. Aucun modèle, aucun spécialiste, aucune verticalité ne semblait en mesure d’imposer sa solution. N’était-il pas temps d’essayer l’horizontalité ? Le redémarrage nous offrait l’opportunité non d’une page blanche mais d’une remise en question. Sans doute naïvement, on imaginait reposer la question du projet.
On le sait, la machine consumériste s’est remise à tourner et le monde d’après s’est retrouvé comme un vieux masque jeté par terre. Plus question d’assortir la relance de critères sociaux ou environnementaux. Qu’a-t-il manqué ? Le rapport de force. Passer de l’espérance à la volonté. Est-ce pour autant une occasion manquée ?
Au moment d’affronter les crises, il est utile de se souvenir qu’aucune spécialité ne nous a été d’un quelconque secours face au Covid. Et d’en venir à l’approche holistique défendue par Bernard Stiegler : ré-agencer les bouts de savoir, non pour correspondre à un modèle mais pour, collectivement, répondre aux enjeux. Passer du rationnel au raisonnable, de la gestion à la politique. Le virus a fait sa part, à nous de nous mettre au boulot.
Lecture
Bernard Stiegler, Qu’appelle-t-on panser ? – 2. La leçon de Greta Thumberg, Les liens qui libèrent, 2020.