Tête perdue, tête foutue
Laurent Bouchainfils, metteur en scène et dramaturge
C’est acté… la tête de maman est perdue ! On a fouillé sa chambre, cherché entre le fauteuil roulant, le frigo, la table et le lit, démonté les tiroirs, vidé les poches des robes et vestes… et rien, aucun indice. Sa tête a disparu !
Comme elle ne nous voyait plus, elle a dû la lancer à notre recherche ! En mars déjà, elle l’avait chiquenaudée entre inquiétude et affolement ! Il nous a fallu attendre huit semaines pour qu’elle réapparaisse souriante entre deux chansons de Frank Michael ou de Mike Brant. Certes, les soignants du home et la magie de ses arrière-petits-enfants nous ont bien aidé à la ressouder, mais aujourd’hui, hélas, elle s’est à nouveau détachée ! C’est horrible à dire mais quand on pense à ce bourgmestre qui interdit toutes les recherches de têtes ou aux sibyllins ministres qui affirment l’œil mouillé qu’ainsi font-font-font les petites marionnettes ou encore aux incrédules du masque, aux accrocs de la fête ou aux fougueux de la bise… ben… on est bien seuls avec nos sanglots longs des violons de l’automne qui bercent notre cœur d’une langueur monotone ! Pauvre tête de maman… ah, si elle pouvait se retrouver dans les mains de Mike Brant et s’il pouvait lui faire un poutou… elle aimerait ça… le poutou… c’est sûr !
Et comme on fait son lit, on se couche… avec ce qui nous tombera dessus… et même si c’est ancien… une tête de maman c’est malin ! Ça donne toujours des trucs et des conseils… faut juste pas la perdre… sinon… c’est foutu-perdu !