Dans un monde, où les mutantxesn peuvent exister.
Installe-toi confortablement, dans un endroit où tu te sens bien, que tu aimes. Tu as face à toi Fen D. Touchemoulin, une artiste visuelle transdisciplinaire bruxelloise et tu vas participer à son projet nommé 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙.
Apprête-toi à muter avec diversxes espèces que tu vas rencontrer grâce à des 𝖈𝖑𝖊𝖇𝖎𝖔𝖘𝖈𝖊𝖓𝖔𝖘𝖊𝖘 (clés) invoquées par un tirage de cartes.
Ton tirage ne sera pas un hasard.
Les 37 clés qui composent le jeu sont étalées devant toi, face cachée, tel un jeu de tarot.
Tu es invitéxe à te connecter à tes proprexs espèces, à toutes les bactéries qui te composent et te font vivre. Celles qui courent sur ta peau ou qui s’affairent dans ton estomac. Est-ce que tu les perçois ? Est-ce que tu les vois ? Prends le temps de sentir tes cheveux et tes ongles pousser… Tu peux maintenant tirer trois cartes puis composer avec elles ta propre clé et la nommer, elle sera ta 𝖌𝖚𝖎𝖉𝖆𝖓𝖈𝖊.
Alors, qui es-tu ? Où vas-tu ? Mais surtout, avec qui et comment ?
Depuis plusieurs années, Fen D. Touchemoulin est en communication avec des espèces vivantxes qui s’adaptent aux changements climatiques et aux flux migratoires induits. Leurs gènes sont en évolution et adaptation constantes face aux modifications subies par leur environnement. Ce phénomène s’appelle l’épigénétique.
Fen D. Touchemoulin a composé un jeu de 37 clés capables d’ouvrir l’ADN humain et de le transformer en le fusionnant à celui de ces espèces. Chacune, nommée par trois lettres, est composée de plusieurs espèces − végétalxes, animalxes, fongiquexs… − découvertxes dans des livres de biologie de seconde main achetés par l’artiste à moins de 5 €. Leurs représentations sont étudiées, découpées puis recomposées pour former les êtres hybridexs qui accompagnent cette publication.
Tirer les cartes sur lesquelles iels figurent, c’est participer à une performance pour les découvrir, les rencontrer, se les faire raconter par l’artiste. Surtout, c’est entrer en symbiose avec les vivantxes, les considérer, les respecter.
La performance complète s’achève avec le tatouage de la clé – Fen tattoo sous le nom de Cheval Metal Tattoos – par la technique du handpoken. Transformer le regard, transformer les corps, devenir mutantxe pour développer un nouveau rapport au monde, aux vivantxes qui l’habitent, à soi : soyons à l’écoute de nos écosystèmes.
Propos recueillis par Marcelline Chauveau, chargée de communication et de diffusion à Culture & Démocratie
Le projet 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙n de l’artiste Fen D. Touchemoulin est né en 2021 dans le cadre de l’expositionn Péridionn de la collective 𝓁𝒶 𝒮𝒶𝓉𝑒𝓁𝓁𝒾𝓉𝑒n. L’exposition présentait des œuvres de fiction d’anticipation interrogeant des manières de repænser le futur proche à partir des mutations engendrées par la crise écologique. Pour Beth Gordon, membre de 𝓁𝒶 𝒮𝒶𝓉𝑒𝓁𝓁𝒾𝓉𝑒, la littérature de science-fiction est intrinsèquement liée aux problématiques touchant les écologies. Cependant, « dans la science-fiction traditionnelle, l’idée est souvent de partir sur une autre planète parce que la nôtre est détruite. À l’inverse, nous pensons qu’il faut inventer de nouvelles choses pour parvenir à rester vivre sur Terre en réparant ce que l’on a détruitn ».
𝕯- : pour disciplines au pluriel, ce projet mêle les arts, les sciences et les rituels.
𝕮𝖆𝖗𝖊 : c’est prendre soin, de soi, des autres, des vivantxes en général et des écosystèmes en particulier.
𝕽𝖎𝖔𝖙 : pour l’émeute.
𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙* est une émeute de soins.
*Si on le dit vite on peut prononcer par mégarde – mais c’est très bien aussi – « eucaryotes », ce sont les cellules qui nous composent.
Ta pratique est transdisciplinaire, elle brouille les frontières des domaines artistiques dans lesquels on cantonne souvent les pratiques et les œuvres mais aussi des domaines scientifiques, en travaillant à partir de biologie spéculative. Qu’est-ce qui motive ces choix ?
Je suis artiste visuelle, l’appellation englobe tout ! Ma pratique tourne autour du tatouage, du dessin, des sciences(-fictions) et du collage qui est central. Mes collages sculptent les découpes, dessinent des formes. J’ai suivi une formation classique en école des « beaux-arts » mais j’ai toujours eu du mal à trouver ma place dans ces parcours sectorisées qui empêchent les dialogues et donc, à mon avis, les enrichissements mutuels des pratiques. Il faut toujours entrer dans une « section » et que toute pratique soit nommée, c’est très réducteur. Quand j’ai terminé mes études j’ai dû, comme la majorité des diploméxes, m’adapter à un nouvel environnement de travail. Tout à coup, il n’y a plus d’atelier à disposition, plus de matériel, plus de moyens, plus rien pour travailler en fait. Je suis tombée dans une sorte de vortex dans lequel c’est le fanzinen qui m’a fait vibrer. Le fanzine crée des moyens d’expression et de diffusion alternatifs aux circuits normés. Il redéfinit constamment ses propres règles, car ce sont de petits tirages faits avec les moyens du bord. Le jugement ou l’attente de l’autre sont dépassés, il n’y a pas de mode, pas de cloisons mais sans cesse de l’expérimentation.
J’ai alors commencé à déconstruire ma pratique artistique. Tout d’abord, du fait de ces contraintes pratiques et matérielles. Ensuite, parce que le fanzine peut être politique, philosophique, musical, magique, ce qui fait circuler les sources d’inspiration et les savoirs. J’ai rencontré d’autres milieux, travaillé en collaboration notamment avec des musicienxnes et j’ai découvert une liberté qui me correspondait beaucoup plus. Les fanzines scientifiques par exemple sont assez rares et j’aime beaucoup l’idée que nous, non-scientifiques, puissions nous emparer de savoirs et les diffuser par ces biais ! Il y en a de plus en plus dans les milieux militants, surtout sur la gynécologie, comme le super S’armer jusqu’aux lèvres.
« Déployer des formes artistiques nourries de leur indéfinition, de leur émancipation de toute catégorie artistique, et avec elles, ouvrir des espaces pour une réappropriation de l’engagement et de la prise de position dans le monde, où auraient cours les notions de responsabilité, d’interdépendance et d’attention. »
Proteus. Cahiers des théories de l’art n°19 – « Le Rituel dans l’art », 2022, p. 10.
Je trouve que ton projet 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙 remet fortement en question les rituels de l’art contemporain parce qu’il change la notion même d’œuvre d’art – traditionnellement unique et entourée d’une certaine aura qui fait qu’on ne doit pas, par exemple, la toucher et dont la valeur financière est définie par le marché de l’art. 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙 est à la fois une « performance » non enregistrée – que tu préfères nommer rencontre – entre toi et unxe participantxe qui choisit le lieu où elle se déroule. De multiples dessins – appelés « guidances » – sont donnés aux participantxes à la fin de la performance et des tatouages dont tu définis les prix mais que tu troques volontiers sont réalisés soit dans des salons où tu es invitée un peu partout en Europe, dans ton atelier, voire même sur un coin de canapé. La « monstration » et la vie du projet se développent donc majoritairement en dehors d’un espace d’exposition ou d’un quelconque espace institutionnel. Enfin, tu ne places plus du tout les personnes en spectateurxices de l’œuvre mais en acteurxices du projet. Tu nous expliques l’émeute que tu crées dans le monde de l’art contemporain, cette résistance créative qui ouvre de nouveaux possibles et développe de nouveaux imaginaires de l’art ?
Je développe en effet cette idée de la performance comme une rencontre dans un moment et un espace présents. Je ne suis pas à l’aise avec les expositions, car c’est souvent une monstration non interactive. J’avais envie de rencontrer les personnes qui allaient expérimenter et vivre mon travail puis de pouvoir échanger avec euxelles. Le tarot m’est apparu comme le format idéal entre interactivité et performance, dans le sens où je raconte un récit : j’immerge les personnes dans l’univers du projet en les faisant participer.
Les cartes du projet, les clébioscénoses, sont les éléments qui s’approchent le plus de l’œuvre d’art. Je les ai créées à partir de découpages et collages de planches de biologie et je conserve les originaux uniques de chacune. La question de l’unicité se pose pour ce jeu de carte, car il n’existe pour l’instant que mon exemplaire que j’active avec les participantxes lors du projet. Je pourrais le reproduire, l’éditer et le diffuser, mais j’aurais l’impression qu’alors le projet m’échappe, que la création de ces clés aussi. Et pourquoi pas… même si le déroulé de la rencontre et sa narration ne seraient forcément pas exactement les mêmes que les miennes. Quelque part, j’aurais peur que ça brise le rituel de ce projet et le caractère magique que tout ce protocole créé. Éditer fige, aussi, alors que j’aime que le projet continue sa mutation. Ce qui me dérangerait vraiment c’est que les personnes se fassent tatouer ces tirages par d’autres tatoueurxes. Le tatouage des clés est l’achèvement ultime de la mutation, donc du projet 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙. Je le réalise en handpoken pour être au plus proche des personnes qui mutent avec les espèces de leur clé. Il s’agit d’un moment de care, un rituel de soin pendant lequel je prends le temps d’échanger avec les personnes pour choisir l’emplacement du tatouage, son arrangement, reparler du projet… C’est un moment intime, important et particulier que je veux partager et vivre.
Ce sont en effet les personnes qui alimentent mon travail et ma pratique artistique avec le projet 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙. Je ne peux pas le faire seule. Engager fortement les personnes dans les œuvres pourrait devenir un rituel de l’art contemporain qui créerait du collectif et une puissance d’agir. L’art peut en effet mobiliser les personnes via des objets, des signatures, des traces. Les participantxes disent souvent qu’ilxelles se sentent concernéxes par le projet et ses discours, parce qu’ilxelles en sont parties prenantes. Plusieurs de ces personnes tatouéxes m’ont raconté en avoir croisé d’autres par hasard et s’être « reconnuxes » puis misxes à échanger. Nous sommes une communauté de mutantxes connectéxes en réseau autour d’un projet commun et des souvenirs, sensations et énergies qu’il crée !
« Le Rituel est ce qui évoque le Soi profond d’un groupe. […] [Ils] aident à construire une communauté, à créer un terrain de rencontre où les gens peuvent partager des sentiments profonds, positifs et négatifs – un lieu où ils peuvent chanter et crier, s’extasier ou hurler, mais également jouer ou garder un silence solennel. »
Starhawk, Rêver l’obscur. Femmes, magie et politique, trad. Morbic, Cambourakis, 2015, p. 234-235.
En ce moment la cartomancie est beaucoup utilisée notamment dans l’art mais aussi dans les milieux militants. Comment l’expliques-tu et pourquoi t’es-tu tournée toi-même vers cette pratique ?
La cartomancie est avant tout une rencontre entre deux personnes, avec toute ces interactions dont je parlais au début de notre discussion. Elle apporte aussi un certain lâcher-prise qui peut permettre de raconter une nouvelle perception du monde depuis un point de vue inhabituel. Il s’agit d’une histoire qui nous fait du bien et nous fait vibrer d’une manière nouvelle, qui décale nos perceptions.
J’ai pensé ce jeu sur la base d’un tarot mais pour qu’il puisse parler à des personnes pragmatiquexs. Il n’est pas question de prédiction du futur ou d’alienx mais d’un portrait composé d’espèces existantxes. Je pense qu’aujourd’hui la cartomancie parle aux gens contre l’uniformisation que l’on subit. Notre monde est très impersonnel et aseptisé, il faut entrer dans des codes alors qu’au cœur des cartes, il y a les personnes, leur subjectivité, particularités et aussi racines, pensées. Finalement, un monde sensible à partir duquel on devrait se projeter pour un futur plus habitable et d’une certaine façon plus humain. À travers un tirage, on se donne le soin, la patience et le temps d’écouter ce qui d’habitude nous échappe parmi tous les flux qui nous traversent. Nous jouissons de la liberté magnifique de ce que nous racontons, c’est une belle histoire qui s’écrit aujourd’hui.
En effet, ton projet participe à créer de nouveaux récits face à la crise de l’imaginaire que nous traversons. Quelles autres conséquences désastreuses des crises sociales, économiques et écologiques que nous vivons ton projet entend-il contrer ? Quels manques de notre société comble-t-il ? Finalement, pour toi est-ce que cette création est politique ?
D’une certaine façon, le récit d’hybridation avec d’autres espèces vivantxes que raconte 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙 rassemble toutes formes de vivantxes et pose la question de comment communiquer et (s’)inclure largement pour vivre ensemble harmonieusement.
Nous devons nous adapter, comme toutes les espèces mobiliséxes par ce récit, renoncer aussi en acceptant que des choses disparaissent tout en accueillant les nouvelles qui naissent sans que nous sachions encore ce qu’elles sont. Dans tous les livres que je peux lire et dans mon expérience d’immersion au sein de différents biotopes, je me rends compte que nous possédons ces capacités d’adaptation, de fusion, d’écoute et de compréhension. Le fait d’être de plus en plus d’humainxes et qu’il y ait de moins en moins de diversité d’espèces me questionne et alimente mon travail. Comment essayer de se connecter le plus possible avec les langages et savoirs non-humains si nous ne les connaissons et ne les rencontrons pas ?
Mon projet propose de contrer ce manque de communication et de compréhension de façon artistique et poétique. J’espère qu’il offre un autre regard, plus sensible et émotionnel sur le monde notamment contre la productivité. Comment créer d’autres liens plus horizontaux ? Pour moi il s’agit d’une forme d’écologie profondément anti-capitaliste puisque porter un regard non productiviste sur nos environnements empêche aussi leur exploitation. Pour moi, le capitalisme est un sacré venin qui se diffuse dans notre ADN ! Je me réveille souvent le matin en me demandant comment en est-on arrivéxes là ? Comment a-t-on pu laisser faire ça ? J’aimerais vraiment que nous nous battions plus pour transformer nos imaginaires sur le sujetn. Pensons le monde autrement !
« Les actions politiques deviennent des actions poétiques, esthétiques, qui touchent le sensible, des questions de beauté, les mouvements sociaux en sont les matériaux »
Isabelle Frémeaux, « Art-activisme », Terre à terre, France Culture, 9 mai 2015.
𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙 est une revendication artistique et politique dans le sens où le projet engage les personnes à entrer dans un monde qui appelle à la mixité, l’horizontalité, l’inclusion et la bienveillance. Notre société est trop loin de tout cela. Le projet est de même puissamment queer et écoféministe. J’inclus le besoin d’égalité entre tous les genres. D’ailleurs, la notion de genre n’existe plus vraiment avec 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙. Certaines formes peuvent rappeler des formes vaginales mais d’autres clés impliquent une fluidité de genre et d’identité : les espèces convoquéxes sont hermaphrodites ou peuvent changer de sexe. Parler de cette biologie non-humaine est très important car elle est loin de la vision binaire faussement naturelle que les sciences, cultures ou religions veulent nous transmettre et nous imposer des mondes vivants. Tout est beaucoup plus complexe et subtil que ces récits étriqués dans leurs certitudes. Le milieu queer possède cette force, cette liberté d’expression et d’existence par rapport à qui nous sommes vraiment et qui nous voulons être, en nous faisant vibrer en dehors du regard de l’autre qui nous enferme. Je suis encore loin d’avoir déconstruit tous mes préjugés et mes idées mais ce projet m’aide beaucoup, car je rencontre des personnes incroyablement puissantxes et inspirantxes pour une reconstruction collective. Pour cela, il faudrait « faire des parentxs » et non des enfants comme le dit Donna Harawayn. La famille est aussi à transformer d’ailleurs dans l’idée de créer de nouveaux mode de vie et de communication en commun déjà internes à notre espèce. Des projets de vie s’imaginent autour de moi, d’amixes qui veulent des enfants ensemble pour les élever dans de grandes collocations en communauté. Bien sûr de nouvelles difficultés apparaissent mais ces nouvelles envies participent à la re-complexification du monde dont je pense que nous avons besoin : une famille est toujours bien plus qu’un papa et une maman, je ne vois pas pourquoi certaines personnes s’attachent à défendre cela, c’est absurde.
« Les rituels sont des outils de care qui permettent de prendre soin et de puiser des forces pour les luttes sociales, anticapitalistes, et écologiques. Ce soin et ce renforcement peuvent être individuels et/ou collectifs. »
Cellule d’Actions Rituelles (C.Δ.R), Désorceler la finance (DLF) et N on- A dans Proteus. Cahiers des théories de l’art n°19 – « Le Rituel dans l’art », 2022, p. 91.
À quoi ressemblerait notre monde peuplé de tes mutantxes d’un point de vue utopique puis dystopique ? En effet, beaucoup d’œuvre de science-fiction mettent en scène des inventions qui échappent au contrôle de leur inventeurxse et sont détournées à des fins néfastes pour les vivantxes. Modifier l’ADN est largement controversé aujourd’hui, quelles pourraient être les dérives de la mise en application de ton projet ?
C’est une bonne question à laquelle je n’ai pas vraiment réfléchi ! Le monde serait beaucoup plus étrange et organique, hybride. J’aime l’idée très post-porno de s’allier, d’avoir des relations inter-espèces, de relationner avec une pierre, des plantes… Les moyens de communiquer, relationner et habiter seraient très différents. Il y aurait beaucoup plus de mixité animale, végétale, dans nos déplacements aussi, il n’y aurait presque plus de voitures. Les routes seraient moins droites et perpendiculaires. Du temps ! Il y aurait du temps, j’ai l’impression qu’on en manque, parfois parce qu’on ne veut pas en avoir. C’est un puissant levier de culpabilisation dans nos sociétés productivistes de la rentabilité et de l’efficacitén.
A contrario, la dystopie serait d’exclure, de contrôler, de réprimer et de discriminer. Dans le sens où les personnes qui ne souhaitent pas devenir mutantxes deviendraient des personnes marginaliséxes alors qu’il s’agit d’un projet d’inclusion et non pas d’exclusion.
Quelques références partagées au fil de la discussion
Des artistes se penchent de plus en plus sur la génétique, l’aspect mutant, la science-fiction. Set Chevallier et Chloé Van Oost travaillent par exemple en binôme sur ces sujets à Bruxelles.
Paul B. Preciado avec Testo Junkie (Beatriz Preciado, Grasset, 2008) et Un appartement sur Uranus (Grasset, 2019).
Manifester la magie de Leïla Barkaoui (co-production Xeno-, autoédition, réédition 2021).
Beaucoup, encore et toujours Starhawk, évidemment, qui est pour moi une base.
J’ai découvert après le lancement de mon projet Vivre avec le trouble de Donna J. Haraway (trad. Vivien García, Les Éditions des mondes à faire , 2016, 2020). Le chapitre « Histoires de Camille » avec le papillon Monarque m’a beaucoup touchée (p. 289).
Là, je suis en train de lire Octavia E. Butler.
Tu connais Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier (Gallimard, 1967) ?
Terence McKenna est une super référence au sujet de l’origine de l’ADN.
Jeremy Narby aussi dans Le serpent cosmique, l’ADN et les origines du savoir (Georg, 1997) que j’ai dévoré pendant mes recherches. Il décrit la découverte de l’ADN il y a des centaines d’années par des autochtones parce qu’ilxelles étaient connectéxes à l’ayahuasca. L’écoute de la nature comme apprentissage collectif, scientifique, médicinal présent dans ce livre m’a transcendée.
Afin de sortir de la binarité de genre imposée par la langue française, le x sera utilisé ici pour marquer le neutre entre le masculin et le féminin dans les qualificatifs associés aux espèces vivantxes.
Technique de tatouage à l’aiguille, choisie ici pour ne pas avoir l’intermédiaire mécanique, technique et bruyant de la machine entre la peau des participantexs et l’artiste.
En binôme avec une autre artiste tatoueuse et plasticienne, Giuliana Diada, Fen D. Touchemoulin a proposé un espace de soin et de tatouage dans une partie duquel avait lieu la « performance » 𝕯-𝕮𝖆𝖗𝖊 𝕽𝖎𝖔𝖙. L’autre partie était réservée au projet de Giuliana Diada. « La forêt de soin » avait pris place dans un biocorridor, un passage que les espèces utilisent pour migrer. « Nous avions imaginé et raconté que ce biocorridor passait par l’exposition. »
L’exposition a eu lieu du 9 septembre au 1 octobre 2021 à Atoma à Bruxelles.
« Le péridion désigne une manière complexe de venir au monde. C’est un type de fruit que l’on trouve sur certains arbres fleurissants tels que le pommier, le cognassier ou le néflier. Il est issu de la combinaison de l’ovaire avec les autres organes de la fleur », présentation de l’exposition, profil Instagram de 𝓁𝒶 𝒮𝒶𝓉𝑒𝓁𝓁𝒾𝓉𝑒.
𝓁𝒶 𝒮𝒶𝓉𝑒𝓁𝓁𝒾𝓉𝑒 est une collective de « 6 Curatrix travaillant sur les féminismes intersectionnels dans la science-fiction contemporaine », profil Instagram de la collective.
Citation extraite de l’article « Exposition à Bruxelles : l’art et la science-fiction au service d’un monde meilleur », Centre régional d’information pour l’Europe occidentale des Nations Unies, consulté le 22/08/23.
Publications indépendantes et auto-produites en édition à tirage limité.
Technique de tatouage à l’aiguille, choisie ici pour ne pas avoir l’intermédiaire mécanique, technique et bruyant de la machine entre la peau des participantexs et l’artiste.
Voir à ce propos, Le Journal de Culture & Démocratie n°55 – « Récits », 2023.
« Faite des parents ! » est le titre d’un des chapitres du livre Vivre avec le trouble de Donna J. Haraway, Éditions des mondes à faire, 2020 (2016), p. 217.
À ce propos lire le dossier « Temps » du Journal de Culture & Démocratie n°54, 2022.